QG Melany

La tour est fine, éffilée, mais avant tout la plus grande de la ville. Des antennes radio jaillissent en son sommet et permettent de toucher toutes les zones de Neocity directement.

Toutes les émissions télévisées ou radios sont produites et diffusées depuis la tour, et c'est un donc un point névralgique de l'information. D'autres centres de production médiatique existent aussi, notamment en zone 4, mais leurs programmes sont relayés au QG de Melany avant d'être diffusés.

La presse en ligne et écrite est aussi crée dans la tour, et des serveurs informatiques gigantesques sont établis dans les sous-sol de la tour. D'autres serveurs hôtes sont disposés en zone 4 et permettent l'hébergement des nombreuses données de la corporation.

Il est possible d'entrer dans la tour sans être employé mais une fouille globale est nécessaire aux trois entrées (RDC, Piste d'atterrissage ou tram au milieu de l'immeuble).

Gare Zone 2


- (...) Big City Life, Here my heart have no base, And right now Babylon de pon me case.

Une vielle chanson me trottait dans la tête. Je la savais vieille car la station sur laquelle je l'avais écouté ne passait que des vieux titres. Elle dattait de ... pffff, les environs de 2000 je crois, et reprise mainte et mainte fois. Je le chantonait à voix basse, histoire qu'on ne m'entende pas trop, sinon j'allais passer pour une has been qui n'a rien a faire là.
Les rues n'étaient pas désertent à ma descente du tram, il y avait quelques dégénéré qui se faisait apréhender par la police, ouais, sous mes yeux. Mais ils n'étaient pas dangereux. Il n'y avait que les gens des sectes qui l'étaient!

*Enfin pas tous, évidemment ...*

Je m'étais empressée d'avoir cette dernière pensée. Pour ma mère surtout, bien que je ne la connaissais que très peu. Je haussai les épaule et entrai chez Melany. J'avais droit à tous les scaner possible et imaginable avant de pouvoir atteindre l'étage où je travaillais. C'était calme, il n'y avait personne. Ah si, Berny évidemment, je voulu me faire discrète en passant devant son bureau pour qu'il ne me remarque pas mais, une fois de plus, ça n'avait pas fonctionné. Ce gars est plus que légerement dépressif, a chaque fois qu'il vous adresse la parole c'est pour parler de ses problèmes. J'en eu pour dix minutes avant de prétexter un appel urgent qui m'attendais. Je tournai rapidement dans l'angle du couloir pour être hors de sa vue et me sentis soulagée. J'allai près du distributeur de café, histoire de me prendre un cacao bien sucré pour me faire de la bonne céllulite avant de poireauté sur ma chaise en attendant LE coup de fil qui me permettrait de faire un repportage sansass. En plus, j'avais rien d'autre...

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Au bout d'un long moment le tram s'arrêta à destination. Il était vraiment très haut, à plusieurs dizaines de mètre du sol, et l'on pouvait voir les gens en-dessous, ressemblant à des puces.

Je descendai alors, me dirigeant vers le sas de sécurité. Le scanner me fouilla un long moment, cherchant si j'avais armes ou toute autre chose illégale. Finalement la lumière rouge passa au vert et la lourde porte s'ouvrit en un instant, me laissant entrer avant de se refermer.

Quelques personnes descendues en même temps que moi ne tardèrent pas à passer le sas aussi, avant de se diriger rapidement vers leurs emplois respectifs.

Quant à moi, un vigile vint bientôt me demander ce que je désirais:

"_Je suis Alina Standford, je suis venue voir mon père.

_Un instant s'il vous plait mademoiselle."

Il regarda alors son écran portable, vérifiant si j'avais bien été invitée par mon père. Il reporta finalement son attention sur moi, souriant:

"_Très bien mademoiselle Standford. Votre père est en studio dans la Zone 4 pour le moment, vous pouvez vous rendre dans son bureau pour patienter. Vous savez vous y rendre?

_Oui oui, merci.

_Très bien. J'autorise votre entrée, bonne journée.

_Merci à vous aussi..."

Il entra de nouveaux quelques informations sur son écran tandis que je m'éloignais de lui, me dirigeant vers les ascenseurs. J'entre alors dans la cabine de verre longeant la tour et offrant une vue panoramique de la ville. L'étage 69 arrive à toute vitesse, alors que les effets de cette vitesse ne sont pas dérangeants.

La porte s'ouvre et je pénètre dans les couloirs modernes du QG Melany, croisant des personnages habillés plus ou moins impaccablement, courant de-ci de-là avec des mines concentrées. Je me dirigeai vers le bureau de mon père, disant bonjour aux quelques journalistes que j'avais déja croisés auparavant...

Alors que je m'avançai, je vis une jeune femme près de la machine à café. Je ne croyais pas la connaître, mais son visage me disait vaguement quelque chose. Je l'avais sans doute déja croisée, même si cela faisait un moment que je n'étais venue ici.

Alors que j'allais passer devant un des inombrables bureaux elle me fit signe de m'arrêter, comme si un danger menaçait. Je demeurai incrédule un moment, immobile, puis la vis se rapprocher à la manière d'un chat. Je ne pus m'empêcher de sourire devant ses simagrés. Elle passa délicatement la tête dans l'embrasure de la porte du bureau, puis m'attrapa par le bras me faisant signe de me taire. Je ne dis rien, et elle me tira en douceur vers elle. J'avais du mal à comprendre le pourquoi du comment mais je jouais le jeu, amusée. Un coup d'oeil vers le bureau et je vis un homme retourné, mais je n'eus pas le temps de l'observer davantage.

La jeune femme m'emmena ainsi au près de la machine à café, m'expliquant qu'elle m'avait sauvé la soirée avant de se présenter, tendant la main.

Elle semblait vraiment très extravertie, je ne pus m'empêcher de me sentir légèrement gênée. Je saisis sa main, répondant:

"Standford... Alina Standford... Je..."

Je ne finis pas ma phrase, puis finalement parlai plus franchement tout en désignant le bureau du doigt.

"Est-il si terrible que ça?"

Yelena eut l'air gênée en entendant mon nom, probablement parce qu'elle connaissait mon père. L'appeller "le big boss" me fit sourire, je n'avais jamais vu mon père comme tel. Elle m'expliqua alors le pourquoi du comment sur Berny. Je cernais très vite le personnage, et si elle disait vrai elle m'avait vraiment épargné un moment désagréable au possible.

"Je vois... Merci de l'aide alors."

Elle semblait vraiment très énergique et spontannée, un peu comme Andréa. Non, c'était différent...

"Oui je suis la fille de monsieur Standford comme vous dîtes. Il m'a dit qu'il avait quelque chose à me montrer, probablement un nouveau reportage."

Je n'en mentionnais pas plus, et puis si elle connaissait mon père elle savait probablement que c'était lui qui avait fait diffuser toutes ces infos sur les sectes il y'a déja deux ans. Autant ça avait été le tournant de ma vie, autant ça avait été celui de sa carrière. A l'idée qu'il recommence je ne pus m'empêcher d'avoir un frisson, à la fois d'excitation et de crainte.

"Enfin vous savez probablement mieux que moi ce qu'il fait."

Paraître évasive, ne rien dire...

Je détournai le regard, ne voulant m'attarder sur ce sujet qui me tenait tant à coeur.

"Je vous paye un café pour m'avoir sauvée des griffes de notre 'ami'?"

Je me sentis un peu désemparée sous le flot de paroles de la jeune femme, ne sachant trop quoi répondre. Enfin elle faisait la conversation à elle seule, ce qui n'était pas plus mal. Elle parlait de mon père, d'une façon étrange je dois avouer. Peut-être que je le connaissais aussi mal que je le croyais au fond.

Yelena parla ensuite de la machine à café qui faisait des siennes. Il y'avait des modèles similaires au Kay, et c'est vrai que parfois il fallait y aller avec un certain doigté pour que ça marche. La manière féminine était assurément la meilleure. Je visais le bas de l'appareil, et la pointe de ma chaussure vint heurter avec fracas le métal. La machine se mit à bourdonner un instant, puis un petit "cling" accompagna une tasse de café au lait chaud.

"Désolée, ça ne marche jamais comme on veut ces choses là..."

Elle me demanda alors ce que je faisais, m'indiquant que mon père était fier de moi. Enfin certainement le genre de choses que n'importe quel parent dirait.

"Oh il n'a pas vraiment de quoi être fier, je suis serveuse au Kay, vous connaissez peut-être."

Je laissais bien entendu de côté mes recherches et l'essence même de ma vie. J'avais beau faire les Longiniens restaient inexorablement au centre de mes preoccupations.

Mes yeux étaient de nouveaux sur Yelena, restant discrets. Elle était si différente de moi, mais elle n'étais pas désagréable. Les personnes aussi extraverties avaient souvent autant sinon plus de blessures que la plupart des gens. Enfin je ne savais rien d'elle, je ne pouvais vraiment juger:

"Vous prenez le café?"

Lui demandait-je poliment, pour meubler le début de silence qui s'installait.

Elle donna un coup apparement exactement où il fallait pour que la machine fonctionne. Elle avait l'habitude, comme elle le dit. Serveuse au Kay ... oh ho. Je n'y suis jamais allée, et le nom ne me disait rien du tout! Je haussai les épaules.

- Ca ne me dit rien du tout. C'est quel genre de boite? En tout cas, votre père vous aime et est content de ce que vous faites. Je sais pas plus moi.

Je détestais dire que je ne connaissais pas quelque chose, j'avais l'impression de n'avoir rien affaire au poste de journaliste. Je me demandais souvent si j'étais la digne descendante D'Eva Boris. Petite maman, Kati. Grrrrr, je ne devais plus y penser.
Je regardais encore par la fenêtre, fixant Mars. C'était presque devenu un rituel.

"Vous prenez le café?"

Je me tournai brusquement vers elle.

- Le café? Ah oui. Non non, je n'aime pas le café, merci.

Je laissai encore s'écouler un temps avant de savoir dire quelque chose. On restait là toutes les deux, un silence lourd s'abatit soudain.

- Qu'est-ce que vous faites de votre vie? Vous avez une grande famille?

A mon grand étonnement elle ne connaissait pas le Kay. C'était assez rare chez les jeunes gens, mais bon, ce n'était peut-être pas le même milieu social. Si elle voulait être assistante c'est qu'elle devait cotoyer mieux que des étudiants...

"C'est assez branché, j'ai eu un coup de pot d'y décrocher un job. Mais c'est surtout connu pour les réas, enfin peut-être que c'est pas votre genre..."

Le simple fait d'évoquer la réalité virtuelle me ramenait à mon experience de l'après-midi. Rien à faire je ne pouvais ne serait-ce que l'espace de 5 minutes penser à autre chose qu'aux Longiniens.

Comme elle refusait le café je le bus lentement, plaçant ensuite mon doigt sur la petite plaqu magnétique juste à côté de l'image d'un chocolat fumant. Un autre coup de pied bien placé et cette fois ce fut bel et bien du cacao qui fut offert par la machine.

"Tenez" Dis-je en lui tendant la petite tasse chaude.

Yelena me demanda alors des banalités pour meubler la conversation. Je lui répondais, un peu gênée:

"Et bien j'ai mon appart dans le quartier ouest, et puis... Enfin j'y vis depuis un an maintenant... C'est que... Enfin..."

A ce moment le gong sonna avec justesse, me sauvant in extremis. Je sortis le téléphone de mon sac, et c'était mon père. Il avait juste laissé un message écrit:

Désolé je serai en retard de quelques heures, le travail s'éternise au studio. Si ça te dérange pas d'attendre. A ce soir Alina.

La chance avait tourné bien vite, et je me retrouvais à attendre.

"Mon père va avoir du retard on dirait..."

Je prévoyais déja les heures d'attente à cet étage. Ce n'était pas une si bonne idée que d'être venue...

J'étais surprise qu'elle s'intéresse à ma famille. Enfin il n'y avait pas grand chose à raconter.

"Non je suis fille unique."

Yelena semblait se crisper de plus en plus, ce qui était assez facile à comprendre, j'avais toujours eu tendance à mettre les gens mal à l'aise. Enfin tous sauf Andréa.

"On ne peut pas dire que j'ai honte, ni de la fierté d'ailleurs de ma famille." Enfin si l'on pouvait appeller ça une famille.

J'évitais soigneusement de parle de mes activités, je détestait en parler. Et puis il y'avait fort à parier qu'elle m'aurait prise pour une folle.

"Et vous, vous êtes journaliste n'est-ce pas?"

J'essayai de force un sourire, je n'avais pas envie de la vexer. Elle avait l'air quelqu'un d'agréable, de sympathique même.

"Qu'est-ce qui vous a poussé à faire pareil métier? Il parait que ce n'est pas facile tous les jours, enfin pour mon père c'était le cas."

Je jetai le gobelet dans la poubelle, celui-ci se consumant immédiatement.

Yelena me parla de la famille de manière engagée. Je dois avouer que je n'avais pas la même notion qu'elle de la famille. Je me souvenais des absences, et puis de l'ennuie. Non, pour moi ce n'était pas primordial, ce n'était pas si précieux qu'elle le disait. Enfin, tout le monde ne peut pas être du même avis.

Elle parut alors gênée en parlant de son métier, n'en dévoilant pas beaucoup sur elle, juste des banalités. Je n'en demandai pas plus, je n'avais jamais été de celles qui fouillent dans la vie des autres, et si elle ne voulait pas parler d'elle je n'allai pas l'y forcer.

Par contre cela créa un silence pendant quelques instants. Je n'avais rien dans les mains, et je regrettai d'avoir jeté le gobelet.

"Il se fait tard, je ne vais pas vous retenir toute la soirée en attendant mon père."

Je n'avais pas vraiment envie qu'elle parte, mais je ne savais trop quoi dire.

"A moins que vous fassiez comme lui, à rester des heures au bureau le soir..." Je ris d'un rire nerveux en disant cela. Enfin je ne voulais pas qu'elle sente que je la rejette. Non elle avait l'air de quelqu'un de gentil, et moi comme toujours je n'étais douée qu'à blesser les gens gentils.

Elle ne me posa pas de questions, mes plans dans ma tête n'avaient servi à rien, et c'était temps mieux. Il y eu à nouveau un silence duquel je profiter pour regarder à nouveau Mars. Ce fut Mlle Stanford qui brisa le silence.

"Il se fait tard, je ne vais pas vous retenir toute la soirée en attendant mon père."

Je voulus enchaîner mais et reprit, je la laissai parler puis répondis.

- Vos ne sauriez pas me retenir, je travaille de nuit. Enfin, je travaille

Dis-je en me servant de mes mains pour montrer les guillemets. Elle avait rit avant, le même rire que moi quelques minutes plus tôt. On ne se connaisait pas après tout, comme être différente? Je vous le demande !

- Votre père travaille tard aussi, mais pas pour les même raisons que moi, bien entendu. Haaa, il faudrait vraiment que je devienne son assistante. J'en ai marre de traîner dans les couloirs avec de pareille collègue attendant MON coup de fil qui ne viendra jamais. C'est fou ce que c'est pénible d'attendre.

Je ne lui laissai pas encore le temps dire quelque chose.

- Alors donc, pas de frère ni de soeur. Une mère peut-être?

Elle aussi travaillait de nuit... Sa mimique me fit sourire, je crois que je comprenais très bien où elle en était. Jeune journaliste qui cherchait à faire les gros titres au moins une fois pour vraiment se lancer dans sa carrière. Dire que quelques auparavant j'avais eu de quoi lancer la carrière de mille journalistes... Enfin, je ne pouvais divulguer ce que je savais, ce serait un crime.

Yelena me demanda alors ce que faisait ma mère. Décidemment elle devait être particulièrement attachée à la famille pour poser toutes ces questions.

"Elle est assistante chez Luther, dans les bureaux. Enfin c'est ce que j'ai compris, elle ne parlais jamais vraiment de son travail. Et puis mon père parlait pour deux..."

Cette remarque cynique m'échappa, mais c'était déja trop tard. Tant pis. Je m'approchai alors de la fenêtre, regardant dans la même direction que la jeune femme. Le dôme, ce dôme qui nous cachait les étoiles...

"Vous ne vous êtes jamais demandé ce qu'il y'avait au-delà de tout ça? Comment est la terre? Et est-ce qu'il pleut des fois? Tout est toujours si semblable à Neocity. Il pleut quand personne n'est dehors, la température est toujours agréable, tout va toujours bien."

Je me rendis compte que j'en avais dit beaucoup, et je m'excusai immédiatement:

"Pardonnez-moi, j'ai tendance à me poser beaucoup de questions quand il s'agit du dehors."

Je lui souris:

"Alors que faisons-nous ce soir pendant que vous 'travaillez'"

Je fis le même signe qu'elle, simulant les guillemets...

Yelena me demanda en ironisant s'il y'avait quelque chose au dehors du dôme. Je l'ignorais, mais ce monde n'était pas tout, je le savais. Tout n'était qu'illusion, mais je ne pouvais le dire...

Je souris quand à sa plaisanterie, oui, elle était quelqu'un d'appréciable. Je trouvais le moment de moins en moins crispant, et je la suivis dans son bureau. Celui-ci était assez large, confortable. Ainsi elle était déja reconnue pour son travail. Et si tout ce qu'elle voulait c'était en apprendre sur les Longiniens? Oui, mon père avait bien fait un reportage là-dessus, et moi je savais la vérité. Et si...

Non, notre rencontre était fortuite. L'était-elle?

"Ils vous ont gâtée avec ce bureau..."

Je ne savais pas trop comment rengager la conversation. Pourquoi était-si si difficile de s'exprimer, de parler. Nous étions toutes les deux humaines, oui humaines... C'était peut-être ça qui faisait la différence. Le don de la parole, de la pensée, mais aussi la peur de se blesser, de souffrir par cette même parole. Tout était si compliqué. Tout était si effrayant.

"Et quel est le prochain scoop de Mademoiselle Baranov dîtes-moi?"

Je lui souriai. Sourire... là aussi c'était typiquement humain. Sourire c'était dire que l'on était ami, que l'on ne voulait pas de mal. C'était aussi montrer de la confiance, de la sympathie. C'était tellement important, et personne ne s'en rendait compte. Les Longiniens souriaient-ils?...

Yelena me proposa un siège, et je décidai d'offrir un peu de répis à des jambes fatiguées. Je posai mon sac à mes pieds, tandis que la jeune femme jouait sur son ordinateur. Elle me répondit que c'était dangereux, et je ne pus m'empêcher d'avoir un hoquet à ce moment là. Décidémment le danger était à la mode...

Elle me posa alors une question sur Luther, me demandant si la génétique était le rayon de la corporation. Je n'en savais fichtre rien, du moins pas plus que le commun des mortels de Neocity:

"Euh oui, on peut dire ça je crois. Enfin vous savez, moi et les corporations..."

J'avais laissé échapper cette phrase bien vite, et je me repris aussitôt:

"Heureusement qu'elles existent, mais je n'en sais pas plus que la plupart des gens."

Ne pas montrer ce genre de pensées, surtout pas à une journaliste, surtout pas à quelqu'un connaissant mon père...

Yelena semblait partager mon aversion pour les corporations, elle avait l'air d'être de mon avis. Ce n'était pas forcément bien vu pour une journaliste, surtout travaillant chez Melany. Je me souviens encore de ce que mon père disait, que les vraies infos restaient loin de l'écran et des téléspectateurs.

Mais alors elle prononça un mot qui me fit frémir. Je sentis immédiatement la sueur me couler dans le dos alors qu'elle parlait des Longiniens. Que savait-elle? Pourquoi disait-elle ça? Elle était envoyée par qui?

Garder mon calme, je devais garder mon calme, ne rien laisser transparaitre. Si c'était un test, oui, il ne fallait pas que je le fasse savoir.

"Les longuinians? Qu'est-ce que c'est?"

Paraître stupide, oui... Le travail de mon père ne donnait pas leur nom, elle peut pas savoir que je le sais... Elle peut pas... Ou peut-elle?

J'étais terrorisée, tentant au mieux de me contrôler.

Le rire de Yelena me calma un peu. Je devenais un peu trop paranoïaque avec tout cela, mais qui ne le serait pas à ma place? Elle essaya de noyer le poisson, justifiant que tout celà était normal que de savoir.

Mais elle partit alors plus loin, justifiant qu'elle n'insinuait pas que mon père et moi appartenions à cette secte. J'éclatai de rire, puis mis la main devant la bouche pour rire moins fort.

Faire partie de la secte... L'air déconfit de Yelena ne pouvait pas calmer le rire, qui dura encore quelques instants. Je m'excusai, éssoufflée:

"Pardo...Pardonnez-moi... Enfin c'est juste que je voyais mon père avec une grande cape et... Enfin c'est pas drôle."

Je tentais vainement de reprendre mon sérieux. La raison de mon rire était plus nerveuse qu'autre chose, mais ça je n'aurais pas pu l'expliquer.

"Ne vous en faîtes pas, j'ai très bien compris ce que vous vouliez dire. Mais mon père, je ne sais pas sur quoi il travaille. Ca fait maintenant deux ans ce fameux reportage, et il est toujours en vie. Alors peut-être que rien de tout cela n'existe vraiment au fond..."

Si elle savait ce que je pensais à ce moment précis... Mais je ne pouvais que mentir, c'était la voix que j'avais choisie. Quelle ironie, aussitôt je connaissais la vérité que je me mettais à la cacher aux autres...

L'ambiance finit par se décontracter légèrement, et Yelena changea d'elle-même le sujet de discussion. Il est vrai que parler des Longiniens était pour moi assez délicat, vu que j'en savais trop.

"Ben vous êtes journaliste non? Les sujets délicats, c'est pas votre domaine justement?"

Je souriais en ironisant ainsi.

"Enfin façon de parler..."

Je ne savais pas trop quoi dire à ce moment précis. Le fait de parler des sectes m'avait refroidie, et je n'étais pas très douée pour lancer des discussions passionantes.

"Et vous habitez où?"

C'était toujours mieux que rien. Je pouvais aussi lui demander sa marque de rouge à lèvre tant qu'a faire...

La jeune femme parlait, beaucoup, meublant le silence qui s'était instauré entre nous. C'était je dois l'avouer très appréciable, je n'avais pas à chercher quoi dire, je l'écoutais, enfin vaguement. On avait l'air si normales ainsi...

Ses yeux ne me fixaient pas, et comme je n'osais la regarder directement, c'était une discussion où la distance règnait en maîtresse. Je souriais, poliment, un sourire que j'avais l'habitude de faire en tant que serveuse.

Quelle tristesse... J'étais de plus en plus incapable de comprendre mes semblables... Et si j'allais en bas? Si j'allais voir les Longiniens? Si je devenais comme eux? Peut-être qu'ils me comprendraient? peut-être qu'ils me tueraient... Peu importait.

"Je... Hum excusez moi, je ne me sens pas au mieux de ma forme. Ces temps-ci je..." Devenais folle? Je ne finis pas ma phrase, reprenant plutôt:

"Je ne vais pas attendre mon père, je vais rentrer. Excusez moi de... Enfin pour le dérangement."

Je cherchai dans mon sac et trouvais mon téléphone, avec l'identifiant qui était le mien. Je le lui montrais:

"Si jamais vous voulez... Enfin si vous..."

J'avais de plus en plus de mal à communiquer, il me fallait partir, loin, très loin...